Avertissement : Comme indiqué au début de mon précédent récit, je ne parviens pas à régler comme je le souhaiterais les hauteurs d'interlignes et les retraits de paragraphes, à mon dam. Tant pis...



Lorsqu’on pérégrine pendant quatre jours dans Paris et dans l’Ile-de-France avec sa charmante petite-fille,

  • (quatorze ans, intelligente, jolie, cultivée, et tout, et tout,)

ou dans une ferme au cours d'une après-midi passée avec sa charmante petite-fille

  • (trois ans et demi, vive, jolie, affectueuse, et tout, et tout,)

on n’a pas le cœur à sortir son téléphone-photo à tout bout de champ ou de rue. Les très rares photos prises pendant ce séjour ne concernent

  • (par un hasard non planifié)

que deux églises.


Mauchamps

L'une d'elles se tient au village de Mauchamps dans l’Essonne, entre Arpajon et Étampes, par où nous sommes passés au cours de nos divagations rurales.

Paris_2_1.jpg

Cette petite église dont la nef date du XVe siècle et le clocher latéral du XVIe avait pour curé, pendant la Révolution, un « curé rouge », ami de Gracchus Babeuf,

  • (plus prudent ou opportuniste que lui, il ne sera pas guillotiné
    • ((Babeuf était déjà presque mort lorsqu’il subit la guillotine, ayant tenté de se suicider la veille.))
  • et mourra à Dinan à l’âge de 83 ans en 1830,)

connu sous le nom de Pierre Dolivier, nom qu’il signait parfois lui-même « Olivier » ou « d’Olivier ».
Dolivier fut curé de Mauchamps approximativement de 1785 à 1796, date à laquelle il fut nommé professeur d’histoire à l’École centrale de Versailles. Il transcrivait ses discours ou ses prêches et écrivait des pamphlets, tous dans la veine communisto-anacho-révolutionnaire,

  • (citons, dès avant la Révolution, le Discours sur l’abus des dévotions populaires, prononcé en 1777, « par P*** d’O*** », publié en 1788, ou encore, plus tard, Les Intrigants et les Meneurs des Jacobins, au manège de Franconi. Ordre donné de leur couper la queue, « par Olivier », Maudet, [s.l.s.d., probablement 1793],
    • ((Michel Tourneux résume ce dernier ouvrage ainsi, dans sa Bibliographie de l’histoire de Paris pendant la Révolution française :
      • (((Paris, Imprimerie nouvelle, 1894, p. 428.)))
    • « La scène se passe au manège de Franconi où l’on entreprend de dompter un jacobin "ci-devant homme de lettres" que l’auteur appelle "hongre" ».))
  • ou aussi Grande pétition des ivrognes de Paris contre les marchands de vin, « par Olivier » [s.l.s.d.], ou enfin Le Triomphe des bonnes mœurs sur le faux honneur célibataire, discours de Pierre Dolivier, curé de Mauchamps, à ses paroissiens, pour les disposer à son mariage légalement contracté le 12 novembre l'an Ier de la République française, prononcé le dimanche 21 octobre de la même année, à l’issue des vêpres,
    • ((Étampes, Dupré, [s.d.]))
  • par lequel il annonce son mariage
    • ((La date de ce mariage telle que mentionnée dans le titre de l'œuvre – « 12 novembre l'an Ier » – pourrait surprendre les plus légers des lecteurs actuels par le rapprochement d'un mois du calendrier grégorien et d'une année du calendrier républicain. La coupable inconséquence de leurs pensées leur aurait fait oublier les circonstances de l'instauration du calendrier républicain. C'est le 22 septembre 1792
      • (((soit moins de deux mois avant le mariage du curé)))
    • que la Convention décréta que « Tous les actes publics sont désormais datés à partir de l'an I de la République », mais il fallut plus d'un an pour mettre au point la nomenclature des jours et des mois
      • (((due à Fabre d'Eglantine, qui n'était pas le doux poète champêtre que son nom et son calendrier laissent supposer, mais un redoutable dénonciateur faussaire complotiste
        • ((((voir l'affaire de la liquidation de la Compagnie des Indes))))
      • qui mourut sur l’échafaud moins de six mois après avoir fait adopter son calendrier.)))
    • du nouveau calendrier.))
  • à ses ouailles.)
    • ((Le curé Dolivier, 46 ans, épousa en 1792 Marie Chausson, 26 ans, qui habitait avec lui depuis deux ans et de qui il avait eu un fils neuf mois avant de le mariage.))
  • (Sur la vie et l’œuvre du curé Pierre Dolivier, voir Gabriel Deville, Thermidor & Directoire (1794-1799), Tome V de Histoire socialiste (1789-1900), sous la direction de Jean Jaurès, Paris, Jules Rouff, 1904, p. 545-550, et le site internet https://unsansculotte.wordpress.com/tag/pierre-dolivier/).

dont certains lui sont peut-être attribués à tort,

Cette église possède un joli tabernacle en bois sculpté, de 1751, « fabriqué par le sieur Pinchaut

  • (demeurant aux Conardières de Saint-Yon,)
    • ((Les « Conardières »,
      • (((qu’on écrit plus volontiers aujourd’hui « Cosnardières », par une étrange pruderie,)))
    • sont un lieu-dit du hameau de Saint-Yon, à environ 4 km au nord de Mauchamps.))

aux frais du sieur curé, et doré par Noël, maître-doreur à Paris. »

Paris_2_2.jpg


Maisons-Laffitte

Sans penser à prendre des photos,

  • (stupéfiés que nous étions
    • ((comme avait dû l’être le promoteur immobilier Zhang Yuchen
      • (((où « Zhang » est bien sûr le nom de famille, suivant l’usage chinois de placer le nom
        • ((((qui n’a généralement qu’un seul sinogramme))))
      • avant le prénom qui, lui, se compose de deux sinogrammes, correspondant à deux prénoms,
        • ((((le prénom d’enfance, ou « Ming », donné par le père quand le bébé a trois mois et utilisé par les intimes, et le prénom social, ou « Zi », attribué plus tard et utilisé par les relations et les amis))))
      • prénoms qui ne sont pas, comme en occident, des vocables sans signification, mais qui peuvent être n’importe quels mots du dictionnaire se rapportant à la personnalité de l'individu prénommé. Au cas – rare – où le nom de famille comporterait deux sinogrammes, on veillerait à donner un prénom « d’un seul sinogramme pour sauvegarder l’harmonie des trois caractères qui désignent un individu » [https://chine.in/guide/noms-prenoms_1387.html]. Tout ceci est ici évidemment très simplifié,
        • ((((les Chinois pouvant changer de « prénom » – prénoms, surnoms ou pseudonymes – au cours de leur vie et même après leur mort,))))
      • décrit les usages des Han, et donne les termes chinois en Hanyu Pinyin, c’est-à-dire en chinois mandarin transcrit en alphabet latin.)))
    • qui en fit construire une réplique au nord de Beijing, au début des années 2000.))
  • par la beauté de son architecture tant extérieure qu’intérieure,)

nous avons visité le château de Maisons, à Maisons-Laffitte

  • (où nous nous étions rendus pour acheter un gâteau d’anniversaire, un « Paris-Brest », chez Durand & Fils,
    • ((En 1909, Louis Durand ouvre sa pâtisserie à Maisons-Laffitte. L’année suivante, à la demande de Pierre Giffard,
      • (((le journaliste du Petit Journal qui avait inventé en 1891 la course cycliste Paris-Brest et retour, soit environ 1200 km que le premier vainqueur, Charles Terront, a franchis
        • ((((sur bicyclette Humber à nouveaux pneumatiques Michelin))))
      • en un peu moins de trois jours, sans dormir, ce qui lui a donné l’avantage sur le second, Joseph Louis Laval, qu’on appelait Jiel-Laval,
        • ((((sur bicyclette Clément à pneumatiques Dunlop))))
          • (((((Voir Le Petit Journal du 10 septembre 1891, p. 1 et 2.)))))
      • qui avait eu le tort de prendre trois heures de repos entre Guingamp et Saint-Brieuc,)))
        • ((((Voir Le Petit Journal du 9 septembre 1891, p. 1.)))
    • qui habitait Maisons-Laffitte et se fournissait chez Durand, il invente un gâteau à base de pâte à chou fourrée de crème pralinée à qui il donne la forme d’une roue de vélo et qu’il nomme « Paris-Brest » en souvenir de la course.))
  • établissement aujourd’hui tenu par un arrière-petit-fils du fondateur, qui ne porte pas le nom de « Durand » puisqu’il s’appelle Stéphane Lévêque.)

construit pour René de Longueil par François Mansart

  • (Sur Mansart, voir la précédente balade, Parenthèses(s) vers le nord.)

entre 1636 et 1651.

Par une astucieuse disposition, les maîtres de céans pouvaient avoir le plaisir d’accueillir leurs invités en les toisant de haut, puisque le grand vestibule central

  • (dont chaque angle est orné
    • ((par un nominalisme bienvenu confinant au calembour assumé))
  • d’un aigle au regard perçant, ou « long œil », comme « Longueil »,)

est situé quelques marches en-dessous des deux pièces qui le jouxtent, de part et d’autre.
L’une de ces deux pièces abrite l’escalier d’honneur, qui est une prouesse technique,

  • (chacune des quatre larges volées de pierre longe chacun des quatre murs de la pièce sans aucun soutien apparent, en porte-à-faux, comme « suspendue » en l’air,)

autant qu’esthétique,

  • (par la légèreté de cet escalier monumental CARRÉ, par la balustrade OVALE qui le surplombe, elle-même couronnée par une coupole RONDE)

belle comme du Monk.

Vous décrire tous(tes) les sculptures, décors et ornements, et autres merveilles, de ce château dépasse mes capacités de rédaction et vos capacités d’endurance à me lire,

  • (Ah ! la finesse et l’élégance des chapiteaux des pilastres des façades, où sont utilisés les trois ordres grecs,
    • ((mais sans vulgaire promiscuité,))
  • le dorique au rez-de-chaussée, l’ionique à l’étage et le corinthien au niveau toiture, apparaissant ainsi au regard qui parcourt les façades de bas en haut suivant la chronologie où les Grecs les ont créés. Ah ! les bas-reliefs et les putti réalisés suivant les dessins de Jacques Sarrazin…)

mais on ne peut le quitter sans mentionner le « Cabinet aux miroirs », cabinet intime auquel on accède par la chambre de l’appartement dit « du Roi » : c’est une pièce de plan circulaire, éclairée d’une seule fenêtre, dont les murs lambrissés reçoivent de grands miroirs, dont le sol est couvert d’un somptueux parquet de bois précieux entièrement marqueté de nacre, d’os et d’étain dessinant des motifs floraux, et dont le plafond est une coupole peinte en ciel où volettent des angelots, par Michel Corneille l’Ancien.
Si vous souhaitez voir de bonnes photos du château : [http://peccadille.net/2017/07/15/le-chateau-de-maisons/].

Quelques mots encore sur ce château de Maisons : il a appartenu aux Longueil jusqu’en 1777, quand le comte d’Artois

  • (qui, frère de Louis XVI, s’exila dès le début de la Révolution avant de devenir, trente-cinq ans plus tard, roi de France et de Navarre sous le nom de Charles X
    • ((ce qui lui donna l’occasion de montrer ses talents de colonisateur et de susciter une nouvelle révolution
      • (((qu’on appelle au choix, la « révolution de Juillet », les « Trois Glorieuses » ou encore « l’Hésitation de Juillet »)))
    • on l’on vit la Liberté guidant le peuple emmenant dans son sillage un Gavroche par anticipation,
      • (((celui de Delacroix date de 1830, alors que Victor Hugo fait de Gavroche le héros de l’insurrection parisienne
        • ((((racontée dans Les Misérables, du Livre dixième de la Quatrième partie au Livre premier de la Cinquième partie, inclus, sur environ deux cents pages.))))
      • des 5 et 6 juin 1832,)))
    • ainsi que de jolies barricades))
  • avant d’abdiquer
    • ((tout en étant destitué))
  • et de repartir en exil.)

l’acheta.
Mis sous séquestre durant la Révolution, il fut ensuite adjugé à un fournisseur aux armées, fut racheté par le maréchal Lannes en 1804, passa après la mort de celui-ci en 1809 à sa femme, la duchesse de Montebello, qui le vendit au banquier Jacques Laffitte en 1818. Celui-ci, dont l’immense fortune avait fondu presque totalement vers 1831 n’hésitera pas, pour essayer de se remplumer, à lotir en 1833 l’immense parc de plus de trois cents hectares et à détruire les somptueuses écuries

  • (Mansart avait entièrement cerné le parc de murs de pierre dans lesquels il avait construit deux entrées monumentales, composées de deux portes jouxtées chacune par un pavillon, disposées de part et d’autre d’un espace non muré,
    • ((où un ha-ha interdisait l’accès au parc,))
  • ouvert sur les grandioses perspectives des allées. Quant aux écuries, édifiées aussi par Mansart, elles pouvaient accueillir jusqu’à cinquante-six chevaux et s’accompagnaient d’un manège et d’une galerie couverte.)

du château.

En 1843, un an avant sa mort, Jacques Laffitte

  • (qui avait déjà – depuis 1830 – une rue nommée d’après lui, dans le 9e arrondissement
    • ((Il s’agit de la rue Laffitte, qui s’appelait encore rue d’Artois,
      • (((à ne pas confondre avec l’actuelle « rue d’Artois », dans le 8e arrondissement, qui ne reçut cette appellation qu’en 1897,)))
    • lorsqu’il y acheta l’hôtel de Laborde en 1822.))
  • de Paris)

vit son nom orner «l’embarcadère » ferroviaire de Maisons-sur-Seine, baptisé « Maisons-Laffitte », sur la toute nouvelle la ligne de Paris à Rouen. Mais ce nom de « Laffitte » était aussi celui que portait Charles Laffitte, un neveu de Jacques qui avait obtenu

  • (avec son partenaire Edouard Blount)

la concession de la ligne.
À qui donc s’adresse ce « Laffitte » accolé à « Maisons » dans le nom de la station de chemin de fer ?
À Jacques, comme on le dit le plus souvent ?
À Charles, qui était très attaché à la ville par le hippisme,

  • (
    • ((Oui, je sais, mais, comme le hippie aspire son « h », l’aspiration du « h » des chevaux – qui ne sont pourtant pas de la horse – peut procurer de bonnes sensations.))
  • Il a été, dès 1833, l’un des sept membres fondateurs de la Société d'encouragement pour l'amélioration des races de chevaux en France, qui engendra rapidement le Jockey-Club.)

qui l’a dotée du chemin de fer, qui en sera conseiller municipal de 1859 à sa mort en 1875 et qui y est enterré ? Ou aux deux ? Quoi qu’il en soit, le nom de la station, – « Maisons-Laffitte » – se répandit à partir de son ouverture en 1843, et passa bientôt dans l’usage courant pour désigner le hippodrome

  • (Mmm, quelle aspiration !)

aussi bien que la petite ville elle-même, à la place de « Maisons-sur-Seine », qu’on abrégeait auparavant en un « Maisons » qui pouvait être mal compris.

Le Conseil municipal de Maisons-sur-Seine, peu pressé, finit le 10 novembre 1881

  • (trente-huit ans après que l’on avait commencé à appeler la ville « Maisons-Laffitte »)

par émette le vœu

  • (confirmé par le décret
    • ((publié dans le Bulletin des Lois de la République française N° 746, p. 1507-1508,))
  • du Président de la République française N° 12,684 du 16 octobre 1882.)

de modifier le nom de la commune de « Maisons-sur-Seine » en « Maisons-Laffitte » en raison, certes, de la concurrence de l’appellation utilisée par le chemin de fer, mais surtout parce que, et c’est « beaucoup plus important, le public lui préfère le nom euphonique de Maisons-Laffitte ».


Maintenon

Nous sommes aussi allés visiter le château de Maintenon. Trop disparate, poussant l'hétérogène jusqu'à l'hétéroclite.
Nous en retiendrons toutefois la perspective du parc à la française prolongée par l'Eure, brutalement tranchée par la ligne légèrement biaise de la ruine d'un pont-aqueduc inachevé, dont les arcades parallèles s'ouvrent à claire-voie sur le ciel, à vingt-cinq mètres de hauteur. C'est que, en 1685, Louis XIV se rendit compte que la gigantesque et assourdissante Machine de Marly, à peine achevée, ne parviendrait pas à pomper assez d'eau de la Seine pour assouvir tous ses rêves de bassins, cascades et jets d'eau des parcs de Versailles et de Marly. Aussi fit-il appel en 1886 à Vauban,

  • (dont c'est l'unique projet non militaire,)

pour conduire les travaux de construction d'un aqueduc

  • (dessiné par l'architecte François Blondel, heureux titulaire d'une rue de Paris
    • ((située à proximité de l'arc de triomphe de la Porte Saint-Denis, œuvre de Blondel en 1672))
  • chantée par Georges Brassens
    • ((qui, pouvait à juste titre faire rimer Blondel avec bordel, la rue en ayant été un haut-lieu, illustré particulièrement par le – gros – numéro 32,
      • (((lieu rouvert récemment après rénovation et restauration des femmes nues art déco représentées sur ses céramiques murales peintes et sur ses mosaïques,)))
    • dont le nom, « Aux belles poules », pouvait se référer autant à ses pensionnaires
      • (((avant que Marthe Richard, dans son souci d'édification de notre belle jeunesse, ne soit passée par là : à la fermeture des lupanars, après 1946, « Aux belles poules » devint un foyer pour étudiants, comme nous l'apprend sa notice d'inscription aux Monuments historiques du 26 mars 1997,)))
    • qu'à son décor,))
  • dans Le Pornographe,)

permettant d'apporter l'eau de l'Eure à Versailles sur 80 km. Deux ans plus tard,

  • (Blondel était mort dans l'intervalle,)

ce pharaonique projet fut abandonné avant d'avoir reçu les deux rangées d'arcades supérieures qui devaient élever l'aqueduc à 73 mètres de hauteur, et l'ébauche abandonnée qui subsiste a pris avec le temps un aspect romantique.

Vers 1850, Corot en a fait un petit tableau

  • (huile sur toile, 37 x 28 cm)

peu connu

  • (Il n'a pas été répertorié par Alfred Robaud en 1905
    • ((Alfred Robaud, L’Œuvre de Corot, Catalogue raisonné et illustré, Paris, H. Floury, 1905))
  • mais est indiqué dans le premier Supplément à « L’Œuvre de Corot », d'André Schœller et Jean Dieterle en 1948
    • ((Paris, Arts et Métiers Graphiques, 1948, N° 24.))
  • et, après être passé entre les mains new-yorkaises de Colnaghi et de Nicholas Hall,
    • ((Colnaghi est la très célèbre entreprise anglaise de courtage remontant au XVIIIe siècle, et Nicholas Hall est un ancien de Colnaghi,
      • (((il a dirigé pendant treize ans Colnaghi USA à New York,)))
    • et de Christie's.))
  • il semble appartenir maintenant à un collectionneur privé.)

qui pourrait rappeler de loin le style du « Peintre des ruines », Hubert Robert – 1733-1808 –

  • (Robert, qui peignait aussi bien de vraies ruines que de fausses, est notamment l'auteur d'une Vue imaginaire de la galerie du Louvre en ruine, en 1796.).

Le voici :

Paris_2_3.jpg
(Merci à Nicholas Hall de nous prêter cette unique reproduction en couleurs disponible sur Internet.)


Paris

Nous consacrâmes deux journées aux beautés de la capitale, marchant sur ses trottoirs et dans ses jardins pendant des kilomètres, partant de la gare de Lyon, allant aux rives du port de l'Arsenal, puis à celles de l’île Louviers, nous arrêtant pour contempler à travers les grilles les beaux gardes républicains tourner en carré sur leurs parfaites montures,

  • (paradant comme le duc César de La Tour d'Embleuse
    • ((Edmond About, Germaine, Paris, Hachette et Cie, 1857, p. 11.))
  • au Bois,)

repartant par un quartier chargé de notre histoire

  • (rue Beautreillis, rue des Lions, rue Saint-Paul, rue de l'Ave-Maria)

pour rejoindre le quai des Célestins

  • (non sans avoir regardé au passage l'hôtel de Sens,
    • ((qui m'a fait cruellement ressentir mon ignardise, ne sachant conter ni l'origine XVe - XVIe siècles du bâtiment, ni son boulet fiché dans un mur le 28 juillet 1830 et toujours présent, ni le coupeur de poils de lièvres qui l'occupait au XIXe))
  • puissamment restauré entre 1934 et les années cinquante
    • ((ou plutôt « restitué »,
      • (((Voir la thèse de Thomas Morel, Quand un prélat monte à la capitale. Tristan de Salazar et l’hôtel parisien des archevêques de Sens, École nationale des Chartes, 2015.)))
    • la quasi-totalité des pierres d'origine ayant été remplacée par des pierres neuves))
  • par l'architecte C. Halley
    • ((dont le prénom était, non pas « comète », mais Charles,))
  • célèbre pour avoir enfin ajouté en 1934, dans le plus pur style XVIIe, la façade sud jamais construite de l'église Saint-Nicolas-du-Chardonnet, dont l'édification avait pourtant duré cent ans, de 1667 à 1768.),

qui s'appelle ensuite quai de l'Hôtel-de-Ville,

  • (où les étals raréfiés et généralement fermés des bouquinistes d'un côté et les bistrots à terrasse de l'autre nous firent spéculer sur le maintien du flot d'automobiles sur la voie qui avait été construite initialement pour elles en contrebas, et la piétonnisation des quais supérieurs,
    • ((pour le plus grand bonheur des flâneurs et le développement du petit commerce))
  • plutôt que l'inverse,)

avant d'atteindre,

  • (après avoir salué au passage Étienne Marcel, le prévôt des marchands
    • ((partisan de Charles le Mauvais))
  • de Jean le Bon,)

la façade principale de l’Hôtel de Ville

  • (où nous saluâmes aussi quelques personnages d’importance, et célèbres,
    • ((tels notre ami François Mansart, ou Jean-Rodolphe Perronet, qui fit un pont de pierre à Neuilly en remplacement du pont de bois qui permettait de franchir la Seine au bout de l’actuelle rue du Pont,
      • (((pont sur lequel Blaise Pascal,
        • ((((les chevaux de sa voiture ayant malencontreusement franchi le parapet et plongé dans le fleuve, rompant l’attelage,))))
      • a ressenti un grand vertige
        • ((((tant physique que moral))))
      • face au vide
        • ((((tant physique que métaphysique))))
      • dans l’équilibre instable où il se trouvait,)))
    • depuis Henri IV,))
  • et d’autres
    • ((tels Saint Landri ou Étienne Boileau))
  • peu connus, mais sans doute d’égal importance,)

et la place de Grève

  • (où l'on exécuta pendant cinq-cent-vingt ans
    • ((sans que le lieu ait, jusqu'au Consulat, l'exclusivité de ces divertissements))
  • les condamné(e)s à mort,
    • ((brûlés vifs, décapités, pendus, brûlés morts,
      • (((tels le protestant Anne du Bourg ou la sorcière Galigaï qui connurent la double peine d'être brûlés après avoir été pendu pour l'un, après avoir été décapitée pour l'autre,)))
    • écartelés, roués vifs, étranglés, guillotinés))
  • depuis Marguerite Porrette en 1310,
    • ((quiétiste outrée et poétesse flamande qui, suivant Paul François Velly,
      • (((M. l'Abbé Velly, Histoire de France, tome septième, Paris, Desaint et Saillant, 1758, p. 343.)))
    • aurait écrit et publié « qu’une ame une fois parvenue à l’état d’anéantissement dans l’amour de son créateur, ne péchoit plus, & pouvoit sans scrupule, laisser agir l’appetit inférieur, & lui permettre toutes les choses auxquelles il se portoit naturellement » [sic].))
  • jusqu’ à Jean-Pierre Martin
    • ((violeur, assassin et voleur le 8 novembre 1829 au bois de Boulogne
      • (((avec sa complice la femme Goglin)))
    • de Marguerite Gautruche
      • (((Voir le récit du procès dans le Journal des débats des 25 mai 1830, p. 2 et 3, 26 mai 1830, p. 2 et 27 mai 1830, p. 3.)))
    • ce qui lui valu d’être le dernier guillotiné place de Grève, tandis que sa complice était condamnée à dix ans de réclusion et au carcan.))
  • en 1830, date à partir de laquelle on exécuta à l’aube
    • ((et non plus en plein après-midi))
  • et à la barrière de Saint-Jacques
    • ((et non plus place de Grève))
  • comme l’a noté vigoureusement Victor Hugo dans sa préface du 18 mars 1832 à son texte le Dernier Jour d’un Condamné :
  • « À Paris, nous revenons au temps des exécutions secrètes. Comme on n’ose plus décapiter en Grève depuis juillet, comme on a peur, comme on est lâche, voici ce qu’on fait. On a pris dernièrement à Bicêtre un homme, un condamné à mort, un nommé Désandrieux, je crois ; on l’a mis dans une espèce de panier traîné sur deux roues, clos de toutes parts, cadenassé et verrouillé ; puis, un gendarme en tête, un gendarme en queue, à petit bruit et sans foule, on a été déposer le paquet à la barrière déserte de Saint-Jacques. Arrivés là, il était huit heures du matin, à peine jour, il y avait une guillotine toute fraîche dressée et pour public quelque douzaine de petits garçons groupés sur les tas de pierres voisins autour de la machine inattendue ; vite, on a tiré l’homme du panier, et, sans lui donner le temps de respirer, furtivement, sournoisement, honteusement, on lui a escamoté la tête. »
  • et plus loin : « Vous quittez la Grève pour la barrière Saint-Jacques, la foule pour la solitude, le jour pour le crépuscule. Vous ne faites plus fermement ce que vous faites. Vous vous cachez, vous dis-je ! »
  • et il ajoute dans Les Misérables :
    • ((Deuxième partie, Livre quatrième, Chapitre 1))
  • « Quelques pas encore, et vous arrivez aux abominables ormes étêtés de la barrière Saint-Jacques, cet expédient des philanthropes cachant l'échafaud, cette mesquine et honteuse place de Grève d'une société boutiquière et bourgeoise, qui a reculé devant la peine de mort ; n'osant ni l'abolir avec grandeur, ni la maintenir avec autorité. »)

et de poursuivre, après avoir traversé le square de la tour Saint-Jacques

  • (où nous pûmes rendre hommage au clocher, un joyau de l’art gothique, à Blaise Pascal, jouant ici avec son baromètre, et à Nerval, qui s’y pendit
    • ((Erratum de décembre 2018, post-rédaction donc : Sur l'observation du savant Mimi, il convient de préciser que Gérard de Nerval,
      • (((en mémoire duquel une stèle
        • ((((où figure un profil en bas-relief du poète, par Jehan Du Seigneur, daté de 1831))))
      • et une plaque
        • ((((où sont gravées les deux premières strophes du poème El Desdichado))))
      • ont été érigées dans le square en 1955,)))
    • ne s'est pas pendu en janvier 1855 dans le square-même,
      • (((qui n'a été créé que l'année suivante)))
    • mais un peu plus au sud, de l'autre côté de l'avenue Victoria,
      • (((percée en 1854)))
    • dans une ruelle infâme
      • (((détruite courant 1855, lors de la suppression du quartier compris entre l'avenue Victoria et le quai de Gèvres -- qu'on écrit aujourd'hui « Gesvres » pour une raison qui m'échappe --)))
    • appelée rue de la Vieille-Lanterne,
      • (((à l'exacte verticale du milieu du rideau du théâtre de la Ville, tel que ce théâtre était aménagé lorsqu'il s'appelait encore théâtre Sarah-Bernhardt
        • ((((voir l'entrée « Place du Châtelet », dans : Jacques Hillairet, Dictionnaire historique des rues de Paris, tome 1, quatrième édition, Paris, Éditions de Minuit, 1970, p. 333))))
      • dans les années soixante)))
    • comme l'a raconté en détail Alexandre Dumas dans son journal Le Mousquetaire du mardi 30 janvier 1855,
      • (((le surlendemain 1er février, Dumas y a aussi fait le compte-rendu de l'inhumation du poète au Père-Lachaise)))
    • p. 1 et 2))

et rejoint le bord de Seine,

  • (d’où nous aperçûmes les sommités de deux autres joyaux de l’art gothique,)

par le quai de la Mégisserie

  • (où les étals raréfiés et généralement fermés des bouquinistes d'un côté et les vitrines débordantes des marchands de plantes et d'animaux
    • ((désormais en peluche))
  • de l’autre, nous firent spéculer derechef sur l’inversion des flux automobiles et piétons,)

jusqu’au Louvre

  • (où nous fûmes empêchés
    • ((à cause de la fermeture des grilles pour motif non précisé))
  • d’aller de la Cour Carrée à la place du Carrousel par le pavillon Sully)

que, contraints, nous longeâmes par la rue de Rivoli pour attraper la rue de l’Échelle et la rue d’Argenteuil,

  • (mais Mee,
    • ((un de nos restos coréens favoris, branché celui-ci,))
  • était complet, nous obligeant à pousser plus avant)

et finalement la rue Saint-Anne vers le nord,

  • (rue qui regorge d’exotisme alimentaire asiatique, dont
    • ((au-delà de la rue des Petits-Champs))
  • le coréen Guibine, connu de ma co-marcheuse, et qui nous restaura)

puis, au retour, vers le sud, la rue de l’Échelle et le jardin des Tuileries

  • (Oubliant le petit détour nécessaire à la contemplation des statues de Maillol, nous nous sommes rabattus sur les plus classiques scènes et personnages historico-mythologiques que nous rencontrâmes
    • ((Énée et Anchise fuyant Troie en flammes, la Nymphe de Diane, les enlèvements,
      • (((d’Orythie par Borée, de Cybèle par Saturne, de Déjanire par le centaure Nessus)))
    • Alexandre combattant, le Serment de Spartacus, etc.))
  • en les commentant du mieux que nous pouvions des points de vue morphologique et narratif.)

qui nous ramena à la Seine, que nous franchîmes par la passerelle de Solférino,

  • (Aujourd’hui moderne passerelle Léopold-Sédar-Senghor, elle a pris le relais du pont des Arts en tant que support à « cadenas d’amour » depuis que les grillages du pont des Arts ont été remplacés par des panneaux de verre.)

pour gagner la rue de Solférino et tourner dans la rue de l’Université

  • (où les membres médiatiques d’un parti politique dit d’extrême-gauche s’insoumettaient derrière un demi dans la vitrine du Café des Ministères, derrière l’Assemblée,)

qui nous conduisit aux Invalides, puis rue de Varenne.

  • (au musée Rodin
    • ((dont la buvette étancha nos soifs sous les marronniers, et dans le parc duquel nous jouâmes à repérer les personnage sculptés qui s’étaient déplacés depuis l’établissement de notre plan, avant de parcourir les salles où sont exposées les œuvres de l’artiste et celles issues de ses collections,))
  • qui est dans le magnifique hôtel Biron
    • ((Construit en 1727-1737 pour le riche financier Abraham Peyrenc de Moras, l’hôtel fut vendu par sa veuve en 1753 à Louis-Antoine de Gontaut-Biron, arrière-arrière-petit-fils d’Armand de Gontaut-Biron, qui fut à l’origine de l’expression « Con comme Biron »
      • (((Voir D(M)F, Basquie, Seconde édition, Clavières, Éditions de la Fournial, 2016, non paginé
        [p. 66].)))
    • devenue un proverbe au temps d’Henri IV.))
  • où Rodin s’était installé à partir de 1908.)

d’où le plus proche métro nous permit de regagner les Yvelines ; et le surlendemain, nous repartîmes matin de la gare de Lyon de nouveau vers les rives du port de l’Arsenal

  • (où nous vîmes l’ultime exposition de la Maison rouge,
    • ((la fondation d’Antoine de Galbert, qui avait décidé dès janvier 2017 de fermer sa galerie en octobre 2018))
  • (intitulée L’Envol, qui traitait du « rêve de voler
    • ((vu à travers des œuvres de cent-trente artistes
      • (((parmi lesquels je me permets de citer Yves Klein,
        • ((((avec, bien sûr, la première page de son journal Dimanche 27 novembre, contenant la photo Un homme dans l’espace !,))))
      • le Satrape Panamarenko,
        • ((((chaussures magnétiques, projets de disques miroirs – « Spiegelschijven » – ,))))
      • Georges Méliès,
        • ((((projection intégrale des 12 min 51 s du Voyage dans la Lune,))))
      • Henry Darger,
        • ((((dessins de blengins, mais pas de petites filles à zizi de garçon,))))
      • ou le camarade constructiviste Rodtchenko
        • ((((ici en photographe,))))
      • et de ne pas citer beaucoup d’autres,)))
    • illustrant de nombreux et variés styles et techniques,
  • sans jamais s’intéresser à ceux qui y sont réellement parvenus », comme l’écrivait le dossier de presse, montrant par cette opposition entre rêve et réalité une approche un tantinet sectaire qui ne se ressentait pourtant dans aucun des 1200 m2 consacrés à l’exposition,

avant de traverser la Seine par le pont d’Austerlitz et le jardin des Plantes par l’allée centrale, et de rejoindre la rue Daubenton ;

  • (pour aller déjeuner
    • ((comme d’habitude))
  • dans notre bon petit resto coréen favori de la Rive gauche,
    • ((« La Table d’Hami »))
  • qui était
    • ((comme avant-hier, Rive droite, l’était Mee))
  • complet, nous forçant à expérimenter
    • ((Nous l’avions certes envisagé, mais pour plus tard !))
  • immédiatement le restaurant de la Grande Mosquée voisine : décevante expérience
    • ((une usine à tajines-couscous dont la cuisine est si mauvaise qu’il convient de ne pas s’y attarder,))
  • que nous vous proposons
    • ((et même vous enjoignons))
  • de ne pas tenter.)

de la rue Daubenton, nous enfilâmes les rues Geoffroy-Saint-Hilaire, Linné, Jussieu, et des Écoles jusqu’à la rue Du Sommerard,

  • (d’où nous pénétrâmes dans le musée de Cluny
    • ((sans nous préoccuper outre mesure des règles ou usages typographiques applicables à « rue Du Sommerard » : majuscule à « Du » ?
      • (((comme l’écrit Wikipédia dans l’article sur la rue, arguant à juste titre en note qu’il s’agit du nom d’Alexandre Du Sommerard, dont la particule non nobiliaire ou d’origine étrangère, prend la majuscule,)))
    • trait d’union entre « Du » et « Sommerard », s’agissant d’un nom de rue ?))
  • pour y admirer la Dame à la Licorne en ses six panneaux illustrant les cinq sens et le désir, ou les six vertus allégoriques courtoises développées par Guillaume de Lorris dans son Roman de la Rose.)

puis nous traversâmes le Boules-Miches

  • (en glosant sur la famille Gibert, de « Joseph Gibert » à « Gibert Joseph » et « Gibert Jeune »
    • ((lequel s’appelait Régis,))

et prîmes la rue de l’École-de-Médecine pour rejoindre le boulevard Saint-Germain

  • (Nous y fîmes un petit salut, vers la droite de la Rhumerie,
    • ((qui n’est plus « martiniquaise » !))
  • en direction de la rue de l’Échaudé
    • ((où deux jeunes existentialistes de sexe opposé avaient décidé fin 1947 de « passer un bon moment », d’où résulta l’amour de ma vie,))
  • chère à certain ouvrier ébeniste, à sa femme, modiste, et à leurs deux marmots chéris.)

qui nous mena place Saint-Germain-des-Prés

  • (Arthus Bertrand
    • ((pas Yann, qui en est un rejeton déviant, mais l’orfèvre depuis 1803))
  • a déguerpi de la place, pour une petite boutique quelconque sur la rue Bonaparte, de l’autre côté du boulevard, mais où La Hune
    • ((qui n’est plus La Hune d’antan, la librairie en face du Flore, mais une galerie au bout de la place, à l’angle de la rue de l’Abbaye,))
  • est toujours présente, mais fermée pour travaux.)

où un petit détour par la rue de l’Abbaye et la rue Saint-Benoît

  • (histoire d’évoquer les belles nuits jazzeuses du club Saint-Germain, puis du Bilboquet
    • ((qui en était la superstructure))
  • qui se prolongeaient en face, au bar du Montana ou au Crystal Hôtel, où logeaient les musiciens,)

nous renvoya devant le Flore,

  • (Là, rapide aperçu des temps de Paul Boubal,
    • ((qui habitait pas bien loin, au-dessus de chez Vidal, le disquaire, à l’angle,
      • (((ou à peu près,)))
    • de la rue Bonaparte et de la rue de Rennes,))
  • de Jean-Sol Partre et de la duchesse de Bovouard, et des longs tabliers noirs des loufiats, encore aujourd’hui persistants.)

sur le boulevard

  • (avec
    • ((nonobstant le sens unique))
  • un coup d’œil à gauche vers le fantôme du drugstore Saint-Germain
    • ((où périt dans « l’attentat du drugstore » le 15 septembre 1974
      • (((sous la grenade d’Ilich Ramirez Sanchez, dit Salim Salem Mohammed, dit « Carlos »)))
    • notre ami intime François Benzo))
  • et un coup d’œil à droite vers Lipp,)

avant de le traverser pour nous diriger vers la mode chic

  • (« chic » est invariable en genre et variable en nombre, ce pour quoi Larousse nous recommande sans rire « d’éviter d’écrire chique au féminin »)

de la rue des Saints-Pères et de plonger dans le métro Notre-Dame-des-Champs, qui nous ramena au bercail.

Le soir-même, laissant la jeunesse reprendre quelques forces, nous nous retrouvâmes entre vieux

  • (le Provéditeur Général Légat, la Commanderesse qui l’accompagne et moi-même, vieux reste de Binarité)

pour dîner en devisant dans le quartier de Saint-Augustin où les restos étaient quasi tous complets, ou bruyants, ou occupés à autre chose qu’à servir à manger, ce qui nous fit tâter de la cuisine d’un sommelier assez dispendieux, qui se dit le « meilleur du monde », établi sur l’Haussmann.


Saint-Sulpice-de-Favières

Non loin de Mauchamps, où plane encore le souvenir du « curé rouge » Dolivier, en plein Hurepoix, se trouve aussi le village de Saint-Sulpice-de-Favières, un tout petit village qui dépasse à peine les trois-cents habitants et n’a jamais connu meilleure fortune démographique, de mémoire de vieux et depuis qu’on recense.

Au milieu de ce micro-village trône une église d’imposantes dimensions

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contenant les reliques miraculeuses de saint Sulpice le Pieux, évêque de Bourges (576-647).

Ce petit village qui dépendait du diocèse de Paris voyait dès le XIIe siècle les pèlerins se presser en nombre dans l’église d’alors, dont subsiste la « Chapelle des miracles ». Devant cette affluence, que saint Louis encourageait, on décida de construire une nouvelle église, pouvant contenir jusqu’à quatre-mille personnes. Cette nouvelle église, qui date des XIIIe et XIVe siècles, présente tous les traits du « gothique rayonnant », avec ses surfaces vitrées prépondérantes et ses murs rares, la pierre se bornant à un rôle de structure par piliers, arcades et doubleaux à l’intérieur, contreforts et arcs-boutants à l’extérieur.

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Elle est aussi extrêmement gargouilleuse.

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La façade par où on accède à l’intérieur de l’édifice, construite un siècle après le reste de l’église, ne donne curieusement pas d’impression de hauteur. Elle est percée de trois portails aux multiples décors dont le central est le plus élaboré :

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À l'intérieur, malgré les échafaudages, l'élévation du chœur en impose : près de vingt-trois mètres, soit environ huit étages ordinaires.

Paris_2_8.jpg

On voit que les quatre premières travées de la nef

  • (seules deux des quatre apparaissent
    • ((au premier plan))
  • sur la photo,)

sont moins hautes que le chœur et ne portent pas de voûtes de pierre, mais un berceau en bois avec entraits et poinçons

  • (Ce sont les pièces de charpente apparentes.)

datant du XVIIe siècle, dont on ignore s'il est le fruit d'une réparation à l'identique, ou bien d'une réparation à l'économie après effondrement de voûtes semblables à celles du chœur.

De part et d'autre de la nef, les collatéraux sont deux fois moins élevés.

Parmi beaucoup d'autres beautés qui mériteraient photo et description, nous avons surtout retenu le vitrail du chevet du collatéral de droite,

  • (C'est un très ancien vitrail, datant de la construction de l'église à la fin du XIIIe siècle, qui raconte
    • ((comme une bande dessinée de trente cases,
      • (((six bandes de cinq cases,)))
    • qui se lit,
      • (((comme c'était l'usage à cette époque,)))
    • de bas en haut et de gauche à droite))
  • l'histoire de Marie et l'enfance de Jésus.)

que voici :

Paris_2_14.jpg

Un panneau

  • (entièrement manuscrit)
    • ((y compris les reproductions du vitrail,))

en donne,

  • (image par image, consciencieusement numérotées)

le contenu, de l'annonce d'un enfant par un ange à saint Joachim à la chute des idoles lors de la fuite en Égypte.

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En voici la transcription

  • (histoire de revoir un catéchisme,
    • ((qui puise ici autant dans les évangiles canoniques de Matthieu et de Luc que dans le protévangile de Jacques, dans l'évangile du pseudo-Matthieu, ou dans le De Nativitate Mariae,))
  • qu'on a trop tendance à oublier) :

1. St Joachim déplore de n'avoir pas d'enfant.
2. Un ange lui en promet un – Marie !
3. Les voisines jasent car Anne est déjà fort âgée.
4. Un ange confirme à Ste Anne cette promesse.
5. Rencontre des époux à la Porte Dorée.

6. Ste Anne met au monde la Vierge Marie.
7. Marie conduite au temple à Jérusalem.
8. Ste Anne à genoux voit Marie gravir seule les degrés du temple.
9. Marie présentée au Gd Prêtre.
10. St Joachim et Ste Anne retournent chez eux.

11. L'Ange Gabriel annonce à Marie qu'elle sera Mère du fils de Dieu.
12. La Visitation. Marie salue sa cousine Élisabeth.
13. St Joseph est rassuré sur la virginité de Marie et l'ange l'apaise en lui annonçant l'Enfant-Dieu.
14. St Joseph demande pardon à Marie pour ses soupçons.
15. Mariage de Joseph et de Marie.

16. Naissance de Jésus à Bethléem. L'Enfant-Dieu veillé par Joseph.
17. Des anges annoncent la naissance aux bergers.
18. La circoncision.
19. Les Mages suivent l'Étoile.
20. Ils se rendent auprès du roi Hérode.

21. Les Rois Mages arrivent vers l'Enfant.
22. Le 1er Mage offre son présent à Jésus.
23. Le sommeil des Mages. Un ange leur conseille au retour d'éviter le roi Hérode.
24. La Vierge relit les prédictions.
25. Hérode furieux de ne pas voir les Mages ordonne le massacre de l'enfant.

26. Le Massacre des Saints Innocents.
27. L'Ange apparaît à Joseph et lui conseille de fuir.
28. La fuite en Égypte – On voit que Joseph porte la chemise de la Vierge.
29. Les idoles s'écroulent
30. Au passage de Jésus et de Marie.

De cette fresque, nos esprits prompts à s’égayer auront retenu les trois Rois mages qui dorment comme un seul homme dans le même lit,

  • (image N° 23) :

Paris_2_11.jpg

ou

  • (tels les quatre fils Aymon chevauchant Bayard,)

qui voyagent sur un même cheval

  • (image N° 19) :

Paris_2_12.jpg

Deux autres images nous intriguent car nous n'en avons pas retrouvé l'origine, aucun de cinq textes mentionnés plus haut n'en faisant état.

Il s'agit de l'image N° 3 où l'on nous dit que « Les voisines jasent car Anne est déjà fort âgée »,

  • (Nous ne doutons pas de la réalité de la chose, la réaction des voisines étant bien naturelle ; mais si les textes parlent du désarroi d’Anne qui se sent bien trop vieille pour enfanter, nous n’avons pas lu que les voisines en jasaient.)

et de l’image N° 28 où il est précisé « [qu’]on voit que Joseph porte la chemise de la Vierge ».

  • (Certes, on « voit » que Joseph porte cette chemise jaune sur son bâton :

Paris_2_13.jpg

  • mais quel texte ou légende a raconté que Joseph se charge de la chemise de Marie,
    • ((la seule « chemise » de Marie que nous connaissons est celle dont la relique est conservée dans la cathédrale de Chartres,
      • (((Il ne s’agit pas d’une « chemise » à proprement parler, ni même d’une « tunique »
        • ((((comme indiqué sur le reliquaire de Chartres,))))
      • mais d’un voile de soie de 5,45 m de long par 46 cm de large,
        • ((((qu’on aurait vu à Constantinople au Ve siècle, que l’impératrice Irène l’Athénienne aurait donné à Charlemagne, et que l’un des petits-fils de ce dernier, Charles II le Chauve, aurait offert vers l’an 876 à la cathédrale romane de Chartres qui, ayant cramé en 1194,
          • (((((en épargnant, selon toutes les apparences, le précieux saint voile,)))))
        • a été remplacée par celle – gothique – que l’on connait,))))
      • coupé en morceaux en 1792, dont l’un, resté à Chartres, ne mesure plus que deux mètres de long.)))
    • dont on dit que Marie l’aurait portée lors de l’Annonciation et/ou lors de la Nativité,))
  • chemise que l’on reconnait sur le vitrail à son col et à ses manches,
    • ((bien que les représentations de la fuite en Égypte montrent le plus souvent Joseph
      • (((On ne s’attardera pas ici à commenter la position de Joseph devant ou derrière l’âne, portant ou non l’enfant, ou le tendant à Marie, toutes dispositions qui varient suivant les époques et les influences des représentations.)))
    • portant sur son bâton un baluchon posé « à califourchon » ou un tissu non identifiable,))
  • et dont la couleur jaune est identique à celle de la chemise dont est vêtue Marie lors de l’Annonciation à l’image N° 11, et qu’elle porte encore lorsqu’elle rend visite à Élisabeth à l’image N°12 ?)




Le domaine de Chamarande

Non loin de Saint Sulpice-de-Favières et son église gothique

  • (et conséquemment non loin de Mauchamps et son curé rouge)

se trouve le domaine de Chamarande, vaste parc de près de cent hectares

  • (où trône un monumental requin mégalodon de neuf mètres de long en inox brillant,
    • ((œuvre de Philippe Pasqua, artisse français fort haut coté né en 1965)
  • pendu par la queue à un portique et répondant au nom de Who should be scared ?)

pourvu d’un beau château de pur style Louis XIII,

  • (pierres, briques et ardoises)

entouré de douves,

  • (vides d’eau)

qui ne se visite pas

  • (les planchers de l’étage ne le supporteraient pas)

mais dont le rez-de chaussée s’ouvre parfois à des expositions d’art contemporain, exposition fermée pour l’heure, nous poussant à nous rabattre sur une pièce, située dans les communs, consacrée à l’œuvre d’illustrateur du célèbre « Tsugu-Haru »

  • (ce qui peut se traduire par « héritier de la paix »)

Fujita, le dandy nippo-français et montparno des années folles, et peintre, et catho converti

  • (sous le prénom de « Léonard »)

et pratiquant.

Ensuite de quoi, nous rentrâmes avec la pseudo-jeep vers les Yvelines en devisant de Piet Mondrian, ce qui nous absorba tant que nous ne nous aperçûmes pas que la pseudo-jeep s’égarait en direction de Chartres et Orléans au lieu de nous ramener ‘’at home’’.


La ferme de Gally

L’erreur rectifiée, la grande petite-fille déposée, nous voici en balade à Saint-Cyr-l’École, à la ferme de Gally, avec la petite petite-fille, qui

  • (du haut de son mètre
    • (( approximative mesure pifométrique))
  • et même sur la pointe des pieds)

se retrouva les yeux dans les yeux avec les biquettes qui se promenaient librement, et nettement dominée par l’âne géant ou l’immense verrat, ne dépassant que de peu les oies vicieuses ou les poules aberrantes. Il fut donc nécessaire de prendre de la hauteur en se réfugiant sur un grand tracteur rouge qui justement se trouvait là.

Le dernier diner

  • (en bonne et familiale compagnie à Jouy-en-Josas, au sympathique resto Pipelote)

conclut agréablement

  • (malgré quelques perturbations indépendantes de nos volontés)

cette automnale parenthèse parisienne

  • (qu’il ne nous restera plus qu’à refermer).

Bises.


d.